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PRESENCE TURQUE

Avec les Turcs, Béjaia perdit son statut de capitale, même si elle continua encore à jouer son rôle de chantier de construction navale. Le relais est alors reprit par la province. Toutes les sources indiquent qu’à partir du XVIe siècle la Kabylie a continué à tenir un rôle dans l’histoire du Maghreb. Selon R. Letourneau, « les populations kabyles étaient réparties entre trois commandements : royaume de Koukou, Beni Abbès et Banu Djubar ». L’autorité ottomane n’a pas pénétré les campagnes, ce qui fait que ces populations ont pu conserver intactes leurs institutions politiques et administratives.





L’occupation de Béjaïa par les Espagnols avait contraint de nombreux Ulémas de cette ville à «émigrer» vers la province. C’est ainsi que certains centres d’enseignement vont devenir de véritables instituts (Tamokra,…). Cette réputation va d’ailleurs dépasser le cadre de la Kabylie, et ce, pendant plusieurs siècles. Ainsi, Ibn al-Feggoun (XVIIe siècle), dans son ouvrage «Manchour al-Hidaya » affirmait que de nombreux savants constantinois émigraient dans le pays des Kabyles pour se spécialiser dans les sciences des lectures coraniques. Parmi les plus prestigieuses écoles de la région, citons la Zawiya – Institut de Chellata. Fondée au début du XVIIIe siècle, elle deviendra quelques années plus tard « l’un des centres religieux et scientifique les plus renommés de l’Afrique septentrionale ».



Timaemmert(Institut Supérieur) de Chellata
D'après le Baron H Aucapitaine, elle était aux 18-19 ème siècles
"Le centre religieux et scientifique le plus renommé de l'Afrique Septentrionale"



L'OCCUPATION FRANCAISE

L’occupation française de Béjaia commença en 1833. La cité et sa région opposèrent une résistance farouche et plusieurs événements historiques prouvent qu’elles ne cessèrent jamais d’être un foyer d’insurrection. Ainsi, Feraud, interprète de l’armée française, nous raconte les exploits d’une véritable figure de légende, l’insaisissable Bou Baghla. Il en est de même de ce témoignage inédit sur cette période de la « pacification » de la Kabylie, précisant à propos de la tribu des Béni Oughlis (Sidi Aïch), « qu’elle avait mise sous les armes deux mille cinq cent fantassins ».

 

L’Insurrection de 1871

Cheikh Aheddad
1790 - 1873

 

En 1871, la nouvelle des désastres de la France en Prusse et la diminution de l’effectif des troupes coloniales en Algérie donnent aux populations kabyles l’espoir de recouvrer leur indépendance. C’est le 08 Avril 1871 que le vénérable Cheikh Aheddad proclama à Seddouk (Vallée de la Soummam) le Jihad al-Akbar, répondant ainsi à l’appel d’El-Mokrani. Commandées par les fils de Cheikh Aheddad, à savoir Cheikh Aziz et Cheikh M’hamed, les tribus de la Vallée de la Soummam ont participé aux batailles livrées dans la plaine de Béjaia et aux assauts contre la ville (de Béjaia) en Mai et Juin 1871. L’insurrection s’étendra rapidement à tout le Constantinois et aux confins de l’Oranie. Les deux tiers du pays sont entraînés dans ce mouvement de résistance. Pouvait-il en être autrement ? Cheikh Aheddad n’était-il pas le Moqqadem de la prestigieuse Confrérie Tarahmanit - Rahmaniyya ? Il semble qu’au début du XIXe siècle, cette Tariqa d’essence kabyle arriva à s’affilier une cinquantaine de Zawiya à travers l’Algérie (14 dans le Constantinois, 19 dans l’Algérois et l’Oranie et 16 dans le Sud). Après la « pacification » de la Kabylie, ce chiffre sera multiplié par cinq. Pour punir les révoltés, le vice amiral De Gueydon a séquestré leurs meilleures terres et leurs a fait payer une lourde contribution de guerre.

 

       Blocus de Bougie en 1871
       Et combats du 25/04 au 30/06
Mouvements des Kabyles
Contres attaques Françaises

 

Cheikh Aziz

 

Dès le début du XXe siècle, Béjaia et sa région jouèrent un rôle non négligeable dans l’éveil des consciences et la structuration du mouvement national. En Mai 1945, au moment ou les alliés célèbrent la libération (suite à la terrible deuxième guerre mondiale), l’axe Béjaia – Kherrata – Sétif – Guelma s’embrase. La Kabylie des Babors entre en dissidence. Des manifestations sont organisées pour exiger démocratie et justice face aux sacrifices des musulmans pendant la guerre. Le jour de l’armistice avait été choisi à dessin. La répression coloniale sera d’une férocité atterrante et fît 45 000 victimes.

Deux années après le déclenchement de la lutte armée, il y eu à Ifri (près d’Ighzer Amokrane) le fameux congrès de la Soummam. En effet, il fallait structurer la guerre d’indépendance. Les longs débats (Près de vingt jours) vont déboucher sur la définition d’un programme, la structuration FLN – ALN et l’affirmation de « la primauté du politique sur le militaire et de l’intérieur sur l’extérieur ». Deux institutions sont désignées : un Comité de Coordination et d’Exécution (CCE) et un Conseil National de la Révolution Algérienne (CNRA – sorte de parlement). Par le travail législatif accompli, ce congrès a constitué un tournant et les textes produits inspirent encore de nos jours la destinée de notre pays.


Professeur Djamil AÏSSANI


SOURCES:

 


Le port de Bougie
Tableau du célèbre peintre Albert Marquet (1875-1942)
Metropolitan Museum of New York



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