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APERCU HISTORIQUE

Située au cœur de l’espace méditerranéen, Béjaia (Bgayet, Bougie, Bugia, Buggea), ville d’Algérie qui donna son nom aux petites chandelles (les Bougies) et à partir de laquelle les chiffres arabes ont été popularisés en Europe, renferme de nombreux sites naturels et vestiges historiques, qui témoignent encore aujourd’hui des fastes de sa longue histoire. Son tissu urbain est caractérisé par une continuité ininterrompue d’occupation depuis l’antiquité.


PERIODE PREHISTORIQUE

Fig. S.Hachi  
  Site préhistorique d'Afalou
Des industries inhabituelles pour le contexte
ibéromaurusien ont été mise à jour dans cet abri sous-roche

     En effet, l’occupation préhistorique de la région de Béjaia est remarquable par les nombreux sites et gisements Ibéromaurusiens (de - 20.000 à - 10.000 ans) que l’on rencontre, notamment dans les Babors septentrionaux. Sous forme de semis d’industries de plein air ou d’habitats en abris sous roche, ces gisements ont livré de nombreux restes humains se rapportant à la première arrivée d’Homo sapiensd’Afrique du Nord, l’Homme de Mechta-Afalou, des industries, des structures d’habitats et surtout, des manifestations artistiques. Ainsi, la découverte d’objets d’art figuratif (notamment les figurines zoomorphes en terre cuite dans l’abri sous roche d’Afalou - près de Souk El-Tenine), posent la double question des origines de l’art et de la céramique en Afrique du Nord.

PERIODE PUNIQUE

La position géographique privilégiée de la région se prêtait à l’installation d’un comptoir phénicien ou punique dans lequel Lybiques (anciens Berbères) et Puniques cohabitaient. La baie de Sidi Yahia montrait naguère une chambre creusée dans le roc (un hanout) probablement libyco-punique. On sait peu de choses de la ville punico-libyque. Elle est attestée au milieu du IVe siècle avant J.C. par le Périple dit de Scylax, œuvre d’un géographe grec inconnu. Toutefois, un trésor de monnaies puniques découvert en 1928 rue Fatima montre qu’elle fut entraînée, d’une manière ou d’une autre, dans la seconde guerre punique (entre 210 et 202). De cette période, il est resté fort longtemps un culte Saturne, le nom latin du Dieu Baal, recouvrant également un Dieu Lybique, fortement marqué par la tradition autochtone.   


Caveau punique près de Sidi Aissa



PERIODE ROMAINE

C’est vers 25 avant J.-C. que l’empereur Auguste y fonda la Colonia Julia Augusta Saldensium Septimana Immunis, pour la peupler de vétérans d’une legio VII Augusta, qui avait fait partie de son armée pendant les guerres civiles romaines. Cette colonie, comme une partie de Rome, formait comme une enclave romaine dans le royaume théoriquement indépendant de Juba II, puis de Ptolémée. Après l’assassinat de ce dernier à Lyon, en 39 après J.-C., la Maurétanie fut annexée et divisée en deux provinces Maurétanie tingitane et Maurétanie césarienne (du nom de la capitale, Caesarea, Cherchel). Saldae fit partie de la seconde. Suite à la réforme de Dioclétien (en 303), la Césarienne fut divisée en deux. Saldae devint partie intégrante de la Maurétanie Sitifienne. Progressivement christianisée à partir sans doute de la fin du IIe siècle, la ville se munit d’un évêque, dont le premier connu est attesté en 484 dans la Notitia episcoprum.




Aqueduc romain de Toudja
Cette conduite permettait l'alimentation
en eau de la ville de Saldae (fondée par
Octave en 27-26 avant notre ère)

La ville s’équipa de nombreux ouvrages d’utilité publique. Un siècle et demi après sa fondation, son ravitaillement en eau fut assuré par un aqueduc qui captait la source de Toudja, sur la flanc du massif de Tadart Aghbalou, à 16,5 Km à l’Ouest de Saldae. Une célèbre inscription de Lambèse (aujourd’hui devant l’A.P.C. de Béjaia) nous renseigne sur les péripéties liées au creusement du canal pour le passage de l’aqueduc. Selon les thèses traditionnelles, l’aqueduc aurait constitué un exemple d’ouvrage de génie civil, réalisé par la main d’œuvre militaire. D’après les nouvelles conclusions de J. P. Laporte (1994), la première intervention, vers 137, se serait limitée à une étude de faisabilité, puis quelques années plus tard, à un piquetage du tracé. Les travaux proprement dits auraient duré de 4 à 6 ans et le rôle de l’armée se serait cantonné à la mise à disposition du chantier d’un technicien de haut niveau (un géomètre spécialisé), en la personne de Nonius Datus. La prospérité économique et la vie municipale se traduisirent par de nombreuses dédicaces aux empereurs romains, gravées sur des bases élevées dans le forum (la principale place publique).

Le territoire de la Wilaya de Béjaia a abrité une autre importante ville romaine. Il s’agit de la Colonie Tubusuptu (aujourd’hui Tiklat, à 03 kilomètres de la commune d’El Kseur). Formée également de vétérans de la même septième légion, son nom était Colonia Iulia Aug(usta) Legionis VII Tubusuptu. Ceux de ses habitants qui n’étaient pas encore citoyens romains furent inscrits dans la tribu (une circonscription de vote à Rome) Arnensis. Elle fût chef lieu d’un district militaire sous le bas Empire, probablement dans la seconde moitié du Ve siècle.

Des amphores, dont les anses portent les marques des ateliers de Tubusuptu, retrouvés en Italie (Rome, Ostie, Préneste et Alba Fucens), en Maurétanie Tinginitaine (Basana, Thamusida, Sala et Volubilis), ainsi qu’au lointain pays des Kouch (Méroë en Nubie), nous renseignent sur l’importance de l’activité économique et commerciale de Tubusuptu (et maintenant aussi de Saldae) sous le haut Empire. En particulier, cette cité sera représentée au concile chrétien de Carthage en l’an 411 après J.-C.

Au IIIe siècle, les deux villes, Saldae et Tubusuptu  subirent à plusieurs reprises les assauts des confédérations montagnardes révoltées, notamment celle des Quinquegentanei (en latin : « les Cinq Peuples ») et participèrent à de brutales répressions. Il en fut de même lors de la révolte de Firmus (370 – 373).

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Un document cartographique du IIIe siècle.:La table de PEUTINGER qui positonne Saldae


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